Nouvelles RJO'Brien

Quand révolutionnaire ne rime pas (nécessairement) avec profitable.

21 novembre 2025, RJO'Brien

21 novembre 2025.

Réflexion. Bref, est-ce que RÉVOLUTIONNAIRE est nécessaire synonyme de PROFITABLE? 

 

On parle beaucoup d’intelligence artificielle depuis les derniers mois. On en parle comme révolution technologique, on en parle aussi comme moteur économique avec la poussée des indices boursiers depuis le printemps et l’effet IA des géants des technos. Je remarque que l’opinion sur l’intelligence artificielle est grandement divisée, polarisée même, avec très peu de nuance entre les deux... D’un côté on y voit la solution pour à peu près tout et des milliards de profits éventuels, de l’autre ce sont les risques de dérives éthique ou règlementaire et le mirage d’une baguette magique qui pourrait mener à une bulle spéculative.                                                      

Hier les marchés se sont repliés fortement…. Sans trop de raison apparente, si ce n’est qu’il y avait déjà de la pression depuis une semaine à Wall Street. D’un côté c’est bien, car cela veut dire qu’il n’y a pas eu une déclaration coup-de-poing du Président Trump, ou d’une annonce d’un conflit armé, par exemple, comme on a connu dans les dernières années avec la Russie ou le Hamas ou peut-être même un jour Taiwan et la Chine. C’est bien car cela veut dire qu’on ne doit pas nécessairement tout revoir le monde économique. Par contre, c’est embêtant, angoissant même, car cela veut dire qu’il y a peut-être quelque chose sous le capot des marchés financier qu’on ne voit pas immédiatement. Il y a une expression anglaise qui va comme ça : better the devil you know than the devil you don’t know que je traduirais par il vaut mieux un danger qu’on connaît qu’un danger qu’on ne connaît pas. Les déclarations de l’administration Trump quant aux droits de douanes ou au commerce mondial on commence à avoir la twist. Le développement futur de l’intelligence artificiel c’est beaucoup plus nébuleux.

En ce moment, pour avoir de l’IA, cela prend des investissements. Des centaines, je devrais dire même des milliers de milliards de dollars. Des investissements tous azimuts. Ça va prendre des semiconducteurs, ces fameuse puces (chips) qui propulsent la technologie. Pour fabriquer ces puces, ça va prendre des minéraux critiques, et pour les obtenir il faudra de l’exploration minière. Les investissements se font à l’exposant deux, et même exposant trois ou quatre. Il faudra aussi des ententes commerciales entre les pays qui en ont, qui en produisent et les économies qui veulent les acheter. En ce moment, c’est principalement la Chine qui contrôle la production de ces minéraux rares et critiques. Donc en plus de l’investissement pour extraire le minerai, il faudra s’entendre politiquement sur le commerce. Pas gagné d’avance. Ensuite, pour faire rouler tout cela, il faudra de l’énergie. BEAUCOUP d’énergie. De l’électricité, du nucléaire, du solaire, du vent et du ce-que-tu-voudras-bien mais il faudra du jus pour faire marcher tout cela. Et pour le moment, on n’a pas la capacité. Nous ne l’avons même pas pour la voiture électrique et nos besoins d’aujourd’hui. Donc pour avoir de l’IA ça prend des investissements, ça prend des minéraux, ça prend des accords commerciaux et ça prend de l’énergie, l'arbre est dans les feuilles marilon, marilé. 

Maintenant. Imaginons que tous ces investissements sont réalisés et que les sous sont dépensés…. Now what? Est-ce que le retour sur l’investissement est assurément positif? J’sais pas. Pas nécessairement en tout cas. Si on dépense des milliards et des milliards et des milliards de dollars pour qu’au bout du compte on ne gagne pas nécessairement en efficacité ou en productivité, est-ce que le modèle économique est encore viable? Si je calcule la valeur actuelle nette des cash-flows futurs des 30 prochaines années est-ce que le chiffre est positif? Il y a tellement d’hypothèses à considérer et de pièces en mouvements que la situation a le temps de changer 20 fois d’ici là. M’enfin.

À ce jour, je pense que l’intelligence artificielle a un potentiel géant. Révolutionnaire, sans l’ombre d’un doute. J’pense que ça va bien au-delà de demander des questionsnonounne à ChatGPT si le bouton que tu as sur la bédaine est inquiétant ou pas. Je pense qu’on peut révolutionner le monde tel qu’on le connait aujourd’hui si je pense à des voitures qui se conduisent d’elles même, ou des robots humanoïdes qui plient la brassée de linge que personne veut plier : les 36 milles morceaux de vêtements de bébé et d’enfant. Un monde futuriste tout droit sorti d’un film de science-fiction, c’est possible, pourquoi pas? L’IA peut propulser le commerce en ligne aussi – on voit l’appétit des entreprises à utiliser ChatGPT directement. Si un utilisateur pose une question sur quel frigo acheter, ça serait donc bien d’adon qu’un p’tit lien chez Brault et Martineau apparaisse en même temps. Ou Corbeil… Le spécialiste de l’électroménager : c’est Corbeil ♪… haha je t’ai mis la toune dans la tête je suis certain. De rien. 

En ce moment, pour moi, la grande question au-delà la faisabilité et tout tout, c’est de bien d’être capable modéliser la profitabilité du projet. Le retour sur investissement.

Bref, est-ce que RÉVOLUTIONNAIRE est nécessaire synonyme de PROFITABLE? 

La réponse : non. Pas tout le temps. 

Je me suis amusé à trouver quelques inventions ou technologies qui ont été révolutionnaires sur le plan social, scientifique, technologique, agricole, industriel, ou culturel… mais pas vraiment rentables, du moins pas pour leurs créateurs et investisseurs dans leur phase initiale. Voici quelques-uns en rafale, pas nécessairement en ordre d’importance non plus.

  

  • Le monorail urbain

J’pense même qu’il y a un épisode des Simpson’s là-dessus hahaha…. Révolution d’ingénierie, pensé pour remplacer les rues encombrées. Mais extrêmement coûteux, difficile à intégrer. Quasiment aucun réseau n’a été rentable. 

  • L’aviation dans les 20 premières années

Les pionniers (Wright, Blériot, Santos-Dumont) sont célèbres, mais presque tous ruinés ou incapables de monétiser l’innovation. Il a fallu la Première Guerre mondiale pour rendre l’industrie viable.

  • Dans la même veine d’aviation… Le Concorde

Avion supersonique, prestige mondial. Commercialement? Pertes énormes, carburant cher, marché minuscule. Une révolution technique… mais désastre financier. 

  • Les hybrides de maïs « expérimentaux » des années 40

Génétiquement révolutionnaires. Mais : rendement instable, coûts de production élevés, réticence totale des producteurs. Un échec commercial avant de devenir la norme mondiale 20–30 ans plus tard 

  • Le téléphone (Bell--- Graham Bell)

Le téléphone a transformé le monde… mais les premières décennies ont été financièrement chaotiques : coûts d’infrastructure énormes, compagnies qui faisaient faillite, rentabilité tardive. Ce n’est qu’après consolidation que ça devient un monopole rentable.

  • Le moteur de recherche Google… dans les premières années

Oui, Google est une machine à cash aujourd’hui, mais les premières années, c’était un gouffre financier. L’entreprise brûlait du capital-risque à cause du coût énorme des serveurs. Leur technologie « PageRank » était révolutionnaire, mais sans modèle d’affaires clair. C’est seulement avec AdWords (2000-2002) que la rentabilité est arrivée.

  • L’imprimerie de Gutenberg

Une des inventions les plus importantes de l’histoire humaine. Mais Gutenberg lui-même? Ruiné, poursuivi en justice par son bailleur de fonds Johann Fust, et pratiquement écarté du marché qu’il a créé. L’impact historique est inestimable, mais pas de profit pour l’inventeur. 

  • BlackBerry (RIM) – technologies géniales qui ne rapportent plus

Inventeurs de l’email mobile. Révolution culturelle. Financement difficile tardivement, profit volatil, effondrement rapide.

  • L’ordinateur Macintosh original (1984)

Révolution dans l’interface graphique, la souris, le design. Apple ne fait pas d’argent au début : trop cher, pas d’apps ou de logiciel utile commercialement, faible adoption commerciale. C’est beaucoup plus tard qu’Apple récolte les fruits de cette vision.

  • Le GPS (inventé par l’armée américaine)

Révolution totale : aviation, navigation, logistique, agriculture. Mais aucune rentabilité directe pendant des décennies : c’était un programme militaire sans revenus, et gratuit pour le monde entier une fois déployé.

  • Le thermomètre de Fahrenheit

L’un des instruments scientifiques les plus importants. Mais aucune fortune pour Daniel Gabriel Fahrenheit. Les coûts de fabrication élevés ont limité la diffusion.

  • La radio FM (inventée par Edwin Armstrong)

Peut-être l’exemple le plus tragique : invention supérieure au bandes AM, qualité incroyable, mais guerre commerciale et brevets avec RCA. Armstrong meurt ruiné, même si la FM devient standard mondial ensuite.

  • Les lunettes à réalité augmentée (Google Glass, HoloLens, Magic Leap)

Tech révolutionnaire, vision du futur. Mais aucun modèle commercial clair, coûts énormes, adoption faible. Techniquement génial, économiquement mauvais.

 

SIMON BRIERE

Stratège principal chez R.J. O'Brien & Associés Canada Inc (une compagnie de StoneX).
Tel: (514) 218-6888
Courriel : sbriere@rjobrien.com   
 

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