Nouvelle

Revue du marché des grains pour le 6 juillet 2011

06 juillet 2011,

Après une brève relance hier supportée par un contexte de marché « survendu », de nouvelles prises de position des fonds d'investissement de début de mois et trimestre ainsi que le retour des acheteurs de grains sur les marchés, les prix des grains ont été confrontés aujourd'hui a un cocktail de nouvelles aux effets partagés :

  • Au cours de la nuit dernière, la banque centrale de la Chine a annoncé qu'elle révisait à nouveau à la hausse d'un demi-point ses taux d'intérêt. C'est la cinquième fois depuis le mois d'octobre dernier qu'elle agit de la sorte afin de lutter contre l'inflation et la surchauffe de l'économie chinoise, mais toujours sans succès semble-t-il.

  • En Europe, bien que les problématiques entourant la dette grecque demeurent toujours en cours de résolution, l'attention des marchés se porte maintenant sur le Portugal. La firme de gestion de risque Moody's a annoncé qu'elle réduisait la cote des obligations à long terme du Portugal à « Ba2 », ce qui se révèle être au bas mot un statut de pacotille (« junk »). Dernièrement, les firmes Fitch Ratings et Standard & Poor's avaient aussi réévalué à BBB le cote de crédit du Portugal, soit une note légèrement supérieure à celle de Moody's, mais de très peu. Rappelons que le pays avait pu profiter d'un plan de sauvetage financier de l'Europe de l'ordre de 78 milliards d'euros en mai dernier. La révision qu'a opéré aujourd'hui Moody's accentue la possibilité que le Portugal soit contraint comme la Grèce de revoir le plan de sauvetage qui lui a été accordé par l'Europe, une perspective peu réjouissante.

  • La baisse de cote de crédit du Portugal ainsi que la hausse des taux d'intérêt en Chine ont à nouveau inquiété les marchés et, par la même occasion, relancé à la hausse la valeur du dollar américain établi au moment d'écrire ces lignes à 75,42 points sur son Index alors qu'elle a ouvert la semaine à un creux de 74,435 points. Il est généralement reconnu qu'un dollar américain fort nuit aux exportations de matières premières américaines comme les grains. Par conséquent, sa progression à la hausse a tendance à forcer les prix des grains à la baisse.

  • Les conditions des cultures aux États-Unis ont continué de s'améliorer selon le dernier rapport hebdomadaire du USDA présenté hier en fin de journée. L'état des cultures de maïs classé de « bien à excellent » a grimpé de 1% à 69% et celui des cultures de soya a également augmenté de 1% pour s'établir à 66%. Par contre, ce rapport révèle qu'à l'image des semis américains tardifs de ce printemps, le développement actuel du maïs aux États-Unis l'est égale. En date de dimanche dernier, seulement 6% du maïs était pollinisé contre en moyenne 12% pour cette période-ci de l'année depuis 5 ans et 18% l'an dernier.

  • De plus en plus de spécialistes anticipent que les prochaines semaines pourraient se révéler très chaudes et sèches pour les cultures dans plusieurs régions du « Midwest » américain. Par contre, pour l'instant, les prévisions météorologiques pour les 2 prochaines semaines se révèlent essentiellement favorables aux cultures en cours aux États-Unis. (Voir (en anglais) Brock Associate - No Major Crop Threat in Midwest Forecas)

  • Le nombre d'annonces d'achat de grains par les acheteurs se multiplie depuis la chute importante des prix qu'ont initiée les derniers rapports du USDA. La Chine a réalisé l'achat de près de 1,6 million de tonnes de maïs américain et pourrait en acheter encore pour 450 000 à 500 000 tonnes. Certaines rumeurs circuleraient même à l'effet qu'au bas mot, c'est 10 millions de tonnes que la Chine chercherait à sécuriser afin de renflouer ses réserves dans les prochaines semaines/mois. De son côté, la Corée du Sud a confirmé l'achat de 225 000 tonnes de maïs de la prochaine récolte, dont la moitié en provenance des États-Unis, et pourrait être intéressée à en réaliser d'autres prochainement. L'Égypte a aussi confirmé l'achat de 120 000 tonnes de maïs américain pour livraison d'ici la fin de l'année commerciale en cours.

  • Des averses abondantes se sont abattues sur l'Ukraine et menaceraient d'endommager jusqu'à 30% des cultures en cours. En réaction à ce nouvel imprévu, le groupe privé d'analyse UkrAgroConsult a revu à la baisse la production ukrainienne de blé de 20,4 à 19,8-20 millions de tonnes et celle d'orge de 8,55 à 8,2 millions de tonnes. Il n'y a encore que quelques semaines, en réaction aux très bonnes conditions de développement des cultures, le gouvernement ukrainien avait révisé à la hausse son estimation de production de grains en affirmant qu'elle pourrait même atteindre 50 millions de tonnes. Anciennement part de l'Union Soviétique, l'Ukraine était alors référée comme étant le « grenier à blé de l'URSS ».

  • En réaction aux rapports du USDA et à la chute très importante des prix des grains qui s'en est suivi, il semblerait que les producteurs américains se seraient renfrognés et qu'il leur en faudrait un peu plus pour les convaincre de rependre leurs activités de vente de grains. Sur cette base, la valeur de la base de référence aux installations portuaires du Golf du Mexique (Gulf basis) se serait grandement appréciée en gagnant près de 0,30$US/boisseau. Cette réaction des acheteurs ne corrobore pas avec les chiffres du USDA du 30 juin dernier qui ont indiqué que les niveaux des inventaires trimestriels de grains étaient beaucoup plus élevés que ce que la moyenne des marchés prévoyait.


Sur un fond de contexte général des marchés financiers défavorable ainsi que de bonnes conditions des cultures américaines et des prévisions météorologiques favorables pour le Midwest américain, certains éléments se révéleraient aussi plus encourageants et stimulants pour les prix des grains, à commencer par les nombreux signes de reprise des activités des acheteurs de grains.

Devant cette multitude de facteurs aux effets contradictoires, les prix des grains ont donc évolué de manière partagée tout au long de la journée. Par contre, à l'exception du soya, il semble que le nombre d'éléments pouvant supporter une relance des prix n'aura pas été suffisant pour en empêcher le recul aujourd'hui, particulièrement face à un contexte économique et financier qui incite les investisseurs et spéculateurs à la prudence.

Pour les prochains jours, l'effet négatif du contexte général des marchés financiers négatif et des bonnes conditions météorologiques prévues pourraient se faire encore sentir selon plusieurs analystes. Toutefois, plusieurs commencent déjà à appréhender la publication du prochain rapport mensuel du USDA sur l'état de l'offre et de la demande de grains aux États-Unis et dans le monde qui sera présenté le 12 juillet prochain et qui pourrait apporter son lot de surprises comme se fût le cas le 30 juin dernier.

Tim Hannagan, analyse sénior des marchés chez PFGBest.com, dans un commentaire présenté sur le site d'Agriculture.com :

« Alors, ce sont les conditions météorologiques qui l'emportent lorsque le USDA est tranquille. Mais tranquille jusqu'à ce que le rapport mensuel du USDA soit publié mardi prochain. Et comme nous le savons avec le dernier rapport sur les superficies semées, les surprises surgissent qu'elles soient favorables («bullish ») ou défavorables («bearish »). »


Kevin Van Trump, directeur de Farm Direction, sur le site de Inside Futures :

« Avec plus de temps pour digérer les derniers chiffres du USDA, de nombreux négociants (« traders ») en rient comme une simple plaisanterie. Plusieurs essaient de comprendre exactement avec quoi le bétail américain s'est nourri entre les mois de mars, avril et mai??? Avec le NASS (National Agricultural Statistics Service) qui ne tient pas compte du « grain en transit » actuel, il y a quelques idées qui circulent à l'effet que les problèmes liés aux inondations de la Rivière Missouri ont sérieusement porté atteinte aux derniers chiffres du USDA. Soyez prêt pour une autre pléiade de données mardi prochain alors que le rapport des estimations d'offre et demande agricole mondiale (WASDE) en fournira à son tour. Une chose que je veux croire que nous verrons est un niveau d'inventaires américains de soya de la « nouvelle récolte » beaucoup plus faible. Pour le maïs, les paris sont ouverts, qui sait ce qui sera présenté. »

 

Prix des grains 6 juillet 11

 


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