Suivant une brève tentative avortée de relance ce matin, à l'exception du soya, les prix des grains ont continué de s'effondrer aujourd'hui alors qu'un cocktail d'éléments négatifs se fait toujours bien sentir.
Les conditions météorologiques prévues aux États-Unis demeurent toujours très favorables à la croissance des cultures. Bien que des incertitudes entourent toujours la possibilité qui y ait eu moins d'acréages d'ensemencées aux États-Unis, le beau temps donne maintenant à penser que les rendements des producteurs américains pourraient s'améliorer. Mais ce ne serait pas la principale raison qui explique la dure correction des prix des grains qui semble de plus en plus apparente.
Comme ce fût le cas à quelques reprises au cours de la dernière année, ce sont plutôt des incertitudes économiques et financières qui ont incité les investisseurs et spéculateurs à liquider des positions et abandonner le marché des commodités agricoles.
À l'avant-plan de ces incertitudes, les instances financières officielles en Europe ne s'accordent pas sur un nouveau plan de sauvetage pour aider la Grèce qui ne parvient toujours pas à rétablir sa santé financière. Rappelons qu'hier, la société de notation financière Standard & Poor's a révélé qu'elle réduisait la cote de crédit de la Grèce à CCC et qu'elle n'excluait pas un nouveau déclassement.
Face à cette problématique, la valeur de l'Euro a poursuivi aujourd'hui sa baisse amorcée hier alors que, de son côté, celle du dollar américain a continué de grimper.
Mais la situation en Grèce n'est pas la seule qui préoccupe les marchés, celle des États-Unis aussi. Une pléiade de nouveaux rapports économiques présentés aujourd'hui ont révélé que l'économie américaine demeurait toujours très fragile et encore loin d'être de retour sur pied. Et c'est sans compter que d'ici la fin du mois de juin, le gouvernement américain doit mettre un terme à sa politique d'allègement monétaire en place depuis la crise financière de 2008, une initiative qui soulève de nombreuses interrogations considérant l'état actuel de l'économie américaine.
Enfin, un débat important fait actuellement rage aussi aux États unis à savoir si le plafond de la dette (voir : US Debt Clock.org) américaine, qui est de 14,3 milliards de dollars, doit être augmenté ou non. En principe, cette limite a été atteinte le mois dernier. Mais officiellement, grâce à certaines initiatives particulières, les États-Unis ne seront réellement en défaut de paiement sur sa dette qu'au mois d'août prochain.
Aujourd'hui, le ministre fédéral des finances au Canada, M. Jim Flaherty, a d'ailleurs exhorté les États-Unis d'agir rapidement sur ce dossier sans quoi, des conséquences néfastes et inquiétantes sur l'économie américaine et mondiale pourraient en découler.
Voir - lapresseaffaires - Flaherty demande aux États-Unis d'assainir leurs finances publiques
C'est donc sur ces bases que non seulement les grains, mais aussi l'ensemble des marchés financiers ce sont repliés aujourd'hui :
Prix du pétrole : - 4,00 $ US/baril à 95,35 $ US/baril
Dow Jones Industrial : -180 points à 11 838 points
Standard & Poor's : -23,75 points à 1260,75 points
Bourse de Toronto (TSX) : -135,16 points à 12 962,66 points
L'or : + 1532,7 $ US/once
Fondamentalement, la situation demeure cependant la même du côté des grains. Certains éléments tendent à indiquer que les prochaines récoltes américaines pourraient prendre du mieux. Cependant, cette possibilité demeure encore très incertaine. Dans les faits, pour l'instant, tout indique toujours qu'il y a un risque élevé que la production américaine de grains parviendra difficilement à répondre à la demande l'an prochain. Et suivant cette idée, les prix des grains se doivent toujours de demeurer élevés, tout au moins tant qu'un ralentissement réel de la demande n'aura pas eu lieu.
Prix du maïs
Le prix du maïs a connu une autre journée très difficile aujourd'hui. Pour livraison immédiate (juillet 11), il a reculé de 0,30 $ US/boisseau (11,45 $CAN/TM) pour terminer à 7,255 $ US/boisseau (276,88 $CAN/TM). Il s'agit d'une baisse pour le moins impressionnante de près de 0,75 $ US/boisseau (31 $CAN/TM) depuis son dernier sommet historique atteint vendredi dernier à 7,997 $ US/boisseau (308 $CAN/TM). Pour la prochaine récolte, le prix du maïs a également reculé à nouveau aujourd'hui pour s'établir à 6,66 $ US/boisseau (254,17 $CAN/TM), soit une baisse de 0,1850 $ US/boisseau (7,06 $CAN/TM) par rapport à sa fermeture d'hier.
Excluant le contexte très négatif que connaît l'ensemble des marchés financiers, certains éléments propres au marché du maïs ont aussi contribué à la baisse de sa valeur :
Une rumeur circule à l'effet qu'aux États-Unis, deux usines d'éthanol cesseront temporairement leurs activités en raison d'un manque de maïs ou, selon les sources, à cause de son prix trop élevé des dernières semaines.
Certains croient qu'avec le prix actuel élevé du maïs, le nombre de consommateurs qui en ont changé leur usage par du blé fourrager serait en augmentation.
Les fonds d'investissement continuent de rouler et/ou liquider leurs positions sur le contrat à terme de juillet par crainte, mais également en raison du fait qu'il viendra prochainement à échéance.
Les bonnes conditions météorologiques aux États-Unis laissent entendre que le rendement éventuel des producteurs américains de maïs pourrait s'améliorer.
Par contre, comme le sous-entend dans son commentaire quotidien sur le site de Farm Futures l'analyste des marchés Arlan Suderman, il reste toujours possible de croire que cette baisse du prix du maïs ne soit que provisoire :
« Les utilisateurs finaux (de maïs) sont heureux de voir cette chute de prix, mais aussi contents de rester à l'écart aussi longtemps qu'ils sentent que les prix sont vulnérables à s'affaiblir davantage. Par contre, ils restent prêts à bondir au moindre signe qu'un creux aura été atteint, puisque fondamentalement le contexte du maïs reste optimiste (« bullish »), autant au niveau domestique que mondial. »
Techniquement, sur le contrat à terme de juillet 11, la tendance à court terme haussière en place depuis la mi-mai est définitivement terminée comme le révèle bien son graphique. Par contre, celle à plus long-terme établit depuis la mi-mars demeure toujours effective. Dans l'immédiat, le prix du maïs semble maintenant faire face à un premier niveau de support établi à 7,20 $ US/boisseau (283 $ US/TM). Le bris de ce support dans les prochains jours est à surveiller puisqu'il ouvrirait la porte à ce que le niveau psychologique de 7$ US/boisseau (275,5 $ US/TM) soit testé et brisé, une perspective négative peu encourageante.
Prix du soya
À contre-courant, le prix du soya est parvenu à défier le sentiment général négatif non seulement de l'ensemble du marché des grains, mais également de tous les marchés financiers.
Pour livraison immédiate (juillet 11), il a gagné 0,05 $ US/boisseau (1,78 $CAN/TM) pour clôturer à 13,71 $ US/boisseau (488,35 $CAN/TM). Pour la prochaine récolte (novembre 11), il a progressé de 0,0850 $ US/boisseau (3,03 $CAN/TM) pour s'établir à 13,695 $ US/boisseau (487,81 $CAN/TM).
Concrètement, peu de raisons expliquent la fermeté avec laquelle le prix du soya est parvenu à gagner du terrain face au repli général des marchés. Selon les informations disponibles, ce serait principalement les éléments suivants qui auraient contribué à supporter le prix du soya aujourd'hui:
Le fait que les ensemencements de soya aux États-Unis ne sont toujours pas complétés.
Que les inventaires américains prévus l'an prochain puissent être très serrés.
Qu'en raison des inondations le long des rivières Missouri et Mississippi aux États-Unis, des superficies significatives ne seront pas semées en soya cette année.
Techniquement, sur le contrat à terme de juillet 11, la tendance haussière qui était en place depuis la mi-mai a pris fin. Par contre, il semble dans l'immédiat que le prix du soya soit parvenu à trouver un premier niveau de support intéressant autour de 13,55 $ US/boisseau (498 $ US/TM). Le bris de ce support est à surveiller dans les prochains jours puisqu'il ne restera plus par la suite que très peu de marge de manœuvre avant que le prix du soya ne retourne se transiger près de 13 $ US/boisseau (478 $ US/TM).