Les prix des grains ont terminé la semaine comme ils l'ont commencé, soit à la hausse. Ce comportement est d'autant plus surprenant que vendredi matin, la publication du rapport mensuel du USDA n'a pas joué en leur faveur. Mais, après quelques hésitations, les marchés ont rapidement dénigré les résultats de ce rapport et ont, contre toute attente, relancé à la hausse les prix des grains. Ceux-ci ont donc terminé à nouveau la semaine sur une bonne note.
Ce matin, le USDA a pris de court les marchés en présentant des résultats pour le moins surprenants et à l'opposé de leurs anticipations. Il n'a apporté aucun changement à ses prévisions d'inventaires américains de fin d'année de maïs et de soya. Du côté du blé, il a toutefois réalisé un léger ajustement à la baisse du niveau des inventaires américains pour la fin de cette année.
Dans le monde, le niveau des inventaires américains de maïs a été révisé en baisse, mais moins que prévu. Ceux de soya et de blé ont été réajustés à la hausse.
Pour un survol des résultats de ce rapport du USDA : Survol du rapport mensuel du USDA du 8 avril 2011
Suivant la publication de ce rapport, les réactions ont été multiples et, comme il se doit, contradictoires. Certains jugent tout simplement que les résultats de ce rapport ne reflètent pas la situation réelle et que, à cet effet, le USDA serait dans l'erreur. D'autres croient plutôt que le USDA a voulu demeurer conservateur. Il préfèrerait ainsi attendre la publication du prochain rapport mensuel pour statuer sur de plus faibles inventaires américains considérant qu'un ralentissement de la demande et des exportations pourrait encore avoir lieu.
Dans tous les cas, les résultats ont été décevants. Mais ultimement, comme c'est le cas souvent, c'est le comportement et la réaction des marchés dans leur ensemble qui demeure maître du jeu et détermine la direction que doivent prendre les prix des grains.
D'un simple revers de la main, il semble que ceux-ci ont préféré discréditer les résultats de ce rapport du USDA pour continuer de se concentrer plutôt sur la demande et le fait qu'elle ne montre toujours aucun signe important de ralentissement pour l'instant, et ce, particulièrement du côté du maïs.
Selon les analystes des marchés chez Morgan Stanley présentée dans un article du Dow Jones Newswires :
« Nous croyons que ce résultat est optimiste, et nous continuons de prévoir des inventaires de fin d'année en dessous l'estimation du USDA. »
Arlan Sudermann, analyste des marchés sur le site de Farm Futures :
« Les prix ont ouvert dans l'ensemble à la baisse (vendredi), mais ils sont retournés en territoire positif au cours de la matinée. Comme tels, les marchés sont de retour avec l'idée de rationner la demande, essayant de la ralentir tout en cherchant à gagner des acreages pour la prochaine saison. »
Christian Mayer, analyste des marchés chez Northstar Commodity Investments Co., sur le site de Bloomberg :
« Ça commence à être un peu épeurant du point de vue de combien serré est l'offre présentement. Quelque chose se doit de changer. Soit que les consommateurs réduisent leur demande, ou qu'ils utilisent autre chose comme substitut au maïs. »
Le contexte général des marchés financiers a aussi tourné à l'avantage d'une hausse des prix des grains tout au long de la semaine du 4 avril. Entre l'ouverture des marchés jeudi matin et leur fermeture vendredi, le prix du pétrole à connu une progression très intéressante de sa valeur, passant d'un prix tournant autour de 108,50 $US/baril à un peu plus de 113 $US/baril. De son côté, la valeur du dollar américain a poursuivi depuis mardi une baisse importante de sa valeur, celle-ci étant passée d'un sommet de 76,40 points sur son Index à 75,205 points vendredi en fin de journée.
En raison du lien étroit qui unit le prix du pétrole et celui des biocarburants fabriqués principalement à partir de grains (maïs et soya), il est généralement accepté qu'une hausse du prix de l'or noir affecte de manière très positive les prix des grains. De son côté, en reculant, la valeur du dollar américain favorise les exportations de produits américains comme les grains, ce qui supporte aussi une hausse des prix des grains.
Pour les prochains jours/semaines, l'attention des marchés sera maintenant rivée sur les conditions d'ensemencements aux États-Unis. Et la situation demeurant pour l'instant toujours très préoccupante au niveau d'un éventuel manque à gagner de grains au cours de 2011-12, il ne faudra certainement que très peu d'avaries météorologiques ce printemps pour insuffler un nouveau bond aux prix des grains. Mais en attendant, selon les dernières prévisions disponibles, il semble pour l'instant que les conditions pourraient être plutôt favorables aux ensemencements au cours des prochaines semaines.
**À surveiller - En début de semaine prochaine, le gouvernement américain pourrait être contraint de temporairement fermer les activités des services non essentiels de son administration. Des négociations sont toujours en cours afin de trouver un accord sur le financement des dépenses de l'État. Advenant qu'une fermeture des services non essentiels américains ait lieu, certains anticipent une volatilité accrue des marchés financiers américains, dont ceux des grains. Le rapport sur les conditions des cultures aux États-Unis ainsi que celui sur les inspections des exportations américaines pourraient aussi ne pas être publiés lundi. **
Prix du maïs
Le prix du maïs continu sur ça lancé importante qu'il a débuté il y a maintenant plus d'une semaine avec les rapports du USDA du jeudi 31 mars dernier.
Depuis la fermeture des marchés le mercredi 30 mars, le prix du maïs pour livraison immédiate s'est ainsi apprécié de près de 15% à la bourse de Chicago pour s'établir maintenant à 7,68 $US/boisseau (291 $CAN/TM). Pour prochaine récolte, il n'est pas en reste non plus avec un gain de près de 10% pour se transiger maintenant à 6,5275 $US/boisseau (247 CAN/TM $).
Selon les informations recueillies sur différents sites de nouvelles, ce serait principalement la production d'éthanol aux États-Unis qui susciterait toujours le plus d'enthousiasme et supporterait l'idée que la demande ne fléchit toujours pas malgré la hausse du prix du maïs. Dans son rapport mensuel, le USDA a d'ailleurs confirmé que malgré le prix élevé du maïs des dernières semaines, la consommation de maïs pour la fabrication d'éthanol progresserait toujours. Il a ainsi révisé à la hausse de 125,7 à 127 millions de tonnes l'usage de maïs par les fabricants d'éthanol cette année.
Les propos de Mike McGinnis sur le site de Agriculture.com résument bien la situation à cet effet :
« En Iowa, il y a des usines d'éthanol qui paient les producteurs 0,55-0,66 $US/boisseau (22-26 $US/TM) de plus que le prix du contrat à terme de septembre à 7,11 $US/boisseau (280 $US/TM). M. Glen Hollander, président de Hollander & Feuerhaken et négociant de maïs sur le parquet de la Bourse de Chicago, dit qu'il s'agit d'une autre confirmation que la demande ne fléchit pas. Pendant des semaines, les experts de l'industrie ont dit que les producteurs d'éthanol seraient les 1ers usagers à s'inquiéter que les prix du maïs soient plus élevés. Cependant, avec les marges de profits qui demeurent fortes, il y a un questionnement à savoir quel prix rationnera la demande. »
Rappelons qu'en février dernier, la firme privée Rabobank avait indiqué qu'il faudrait que le prix du maïs dépasse 7,50 $US/boisseau (295 $US/TM) pour que les fabricants d'éthanol éprouvent de réelles difficultés financières et ralentissent leur production. Par contre, le prix du pétrole a progressé de près de 20$US/baril depuis cette période et celui de l'éthanol n'est pas en reste non plus, avec un gain frisant 0,30 $US/gallon.
Techniquement cette semaine, sur le contrat à terme de mai 11, le prix du maïs a atteint de nouveaux niveaux records en testant 7,7325 $US/boisseau (304 $US/TM). Comme le révèle le graphique, de bonnes tendances à moyen terme (vert foncé) et long terme (vert pâle) semblent bien en place pour l'instant, signe très positif. Dans l'immédiat, l'objectif pour le prix du maïs demeure maintenant de briser une 1er résistance à son sommet de 7,7325 $US/boisseau (304 $US/TM) pour aller ensuite tester sa résistance psychologique importante à 8 $US/boisseau (315 $US/TM), niveau historiquement jamais observé dans le passé.
Prix du soya
La réaction des marchés à l'égard du soya demeure présentement difficile à suivre et les raisons qui expliquent le comportement de son prix difficilement prévisibles.
Pour livraison immédiate (mai 11) le prix du soya termine ainsi la semaine en légère baisse nette de 0,0625 $US/boisseau (2,21 $CAN/TM) pour s'établir à 13,9225 $US/boisseau (491,40 $CAN/TM). Pour prochaine récolte (novembre 11), entre la fermeture des marchés de vendredi le 1er avril dernier et celle de cette semaine, le prix du soya n'a pas évolué et demeure à 13,9550 $US/boisseau (492,54 $CAN/TM).
Depuis la parution des rapports du USDA de jeudi le 31 mars dernier, le prix du soya a pu profiter d'un bref rebond suivi d'une baisse progressive de sa valeur jusqu'à jeudi cette semaine. Mais, contre toute attente, le rapport mensuel du USDA qui se voulait quelque peu négatif à l'égard de l'état de l'offre et de la demande de soya n'a eu aucun effet si ce n'est d'initier une relance du prix du soya vendredi. Bien que ce rebond significatif n'ait pas permis au prix du soya de terminer la semaine avec un gain net positif, il a cependant eu le mérite de repositionner le prix du soya à un niveau plus acceptable.
Le fait que le Brésil en soit toujours à récolter une production record de 72 millions de tonnes de soya et qu'il en inonde les marchés internationaux serait l'un des principaux motifs qui expliquent cette situation comme le rappel au Dow Jones Newswires M. Alan Brugler, président de Brugler Marketing & Management LLC :
« La demande pour du soya américain a baissé sur une combinaison de la compétition en provenant de l'Amérique du Sud et de la Chine qui tente d'en réduire sa consommation. »
Par contre pour l'instant, il n'en reste pas moins que selon les derniers chiffres du USDA, la production de soya ne se doit toujours pas de perdre trop tonnage puisque la marge de manœuvre pour répondre à la demande de 2011-12 demeure toujours serrée. Par contre, il semble que les marchés ignorent toujours cette situation ambiguë, préférant profiter plutôt des incertitudes qui entourent le marché du maïs.
Il est d'ailleurs intéressant de constater que le ratio soya/maïs s'établit présentement à 2,14, ce qui favorise distinctement les ensemencements de maïs par rapport à ceux de soya. Dans cette perspective, il se peut fort bien qu'éventuellement les marchés soient forcés de supporter davantage à la hausse le prix du soya sans quoi, les acréages consacrés au soya cette année aux États-Unis pourraient encore reculer davantage et occasionner une problématique importante en 2011-12.
Techniquement, après plusieurs semaines de recul, il semble que le prix du soya soit finalement parvenu à se stabiliser et reprendre du terrain. Sur le contrat à terme de mai 11, la tendance à moyen terme baissière en place depuis la mi-février (jaune foncé), a été brisé, signe positif. Si le support à 13,60 $US/boisseau (500 $US/TM) parvient à tenir le coup au cours des prochains jours, ce niveau pourrait servir de point pivot pour marquer la formation d'une tendance haussière intéressante à moyen terme. Mais en attendant la confirmation de cette possibilité, il reste qu'à long terme, une tendance à la hausse demeure aussi toujours bien ancrée. La prochaine étape pour le prix du soya demeure dans l'immédiat de briser son dernier sommet établit à 14,32 $US/boisseau (526 $US/TM) pour ensuite aller tester une résistance beaucoup plus importante à son sommet de février dernier à 14,6750 $US/boisseau (539 $US/TM).